dimanche 23 novembre 2014

L'image de la Femme

Le Panorama Salon 1896 – Le Nu n°6 – Gaston Schéfer
« La nudité ne se justifie que par la beauté des formes, la grâce des attitudes. La convention admet les nymphes nues au milieu des bois, les sirènes couchées sur la crête des vagues, les déesses accoudées sur les nues ; elle permet à l’artiste de placer son modèle dans le milieu qui lui plait. Mais à la seule condition de charmer le regard par la pureté des lignes et l’harmonie du geste. La question reste de savoir si cette femme nue a pleinement satisfait à cette condition. »
Dans la peinture occidentale, la règle voulait que ni les poils pubiens, ni la fente vaginale ne soient représentés.
L'étude des tableaux par le critique d'art de l'époque victorienne, John Ruskin (1819-1900), l'avait tenu si éloigné de cet aspect de la réalité de l'anatomie féminine qu'il eut la grande surprise de constater, lors de sa nuit de noce, que si effectivement les femmes n'avaient pas de barbe, elles étaient néanmoins pourvues de poils pubiens.
Il en fut paraît-il si consterné, qu'il se trouva durant plusieurs jours dans l'incapacité de consommer son mariage.
Yahvé Dieu dit : "Il n'est pas bon que l'homme soit seul, il faut que je lui fasse une aide qui lui soit assortie."
Alors Yahvé Dieu fit tomber une torpeur sur l'homme qui s'endormit. Il prit une de ses côtes et referma la chair à sa place. Puis, de la côte qu'il avait tirée de l'homme il façonna une femme et l'amena à l'homme. Alors celui-ci s'écria : "Pour le coup, c'est l'os de mes os et la chair de ma chair ! celle-ci sera appelée femme, car elle fut tirée de l'homme, celle-ci !"
C'est pourquoi l'homme quitte son père et sa mère et s'attache à sa femme, et ils deviennent une seule chair. Or tous deux étaient nus, l'homme et sa femme, et ils n'avaient pas honte l'un devant l'autre.
La Genèse, chapitre 2, 18-25
Epilogue
Les nus féminins, qui rencontrent un succès sans cesse croissant comme en témoignent les expositions des Salons fin de siècle, séduisent d'abord et tout naturellement un public masculin sensible au contenu évocateur des images. Ces représentations sont moralement tolérées par la société pudibonde d'avant 1914 grâce à l'alibi historique, exotique chez les orientalistes avec leurs Odalisques, ou mythologique lorsque la femme devient Vénus ou, mieux encore lorsqu'elle se transforme en nymphe.
Les dames habillées de la tête aux pieds de la cour du Second Empire et de la Troisième République n'étaient pas, bien entendu, aussi virtuelles que les nymphes ou Vénus des peintures. Mais, lors des promenades romantiques en galante compagnie dans le Parc Saint-Léger, ces promeneuses aimaient sans doute, secrètement, comme les messieurs d’ailleurs, à s'imaginer dans ces fables un peu libertines mises à la mode par les artistes d’alors.








samedi 22 novembre 2014

Heureuses rencontres

Sous la Troisième République, le polytechnicien Edouard JERAMEC, donne son essor à la station de Pougues, déjà dotée, en 1877, d’une nouvelle usine d’embouteillage située derrière le Casino.
Moyennant la somme de 300.000 francs, il se rend acquéreur de la source Saint-Léger, des dépendances et constitue par acte daté du 9 avril 1879, passé devant Maître Vassal notaire à Paris, une société au capital de 1.300.000 francs.
Quelques années après, la Compagnie des Eaux de Pougues, déjà propriétaire de l’hôtel du Parc, racheta et aménagea le « Splendid hôtel », qu’un particulier avait entrepris de faire construire vers 1884. Edouard JERAMEC exploitera également la source La Salud de Carabana en Espagne.La Belle Epoque : splendeur de la station de PouguesC’est alors que la station thermale de Pougues atteignit son apogée. Environ deux mille curistes venaient y prendre les eaux et la compagnie expédiait pas moins d’un million de bouteilles par an.Des agrandissements sont effectués au Splendid Hôtel qui accueille désormais pendant la saison 260 clients. De nombreuses extensions et aménagements sont apportés, comme l’agrandissement du Casino avec kiosque à petits chevaux et salon de lecture ; comme les constructions en 1907, avec armature métallique, à la mode de l’époque, du Pavillon des Sources avec un promenoir conduisant au Splendid Hôtel et d’une grande serre. Des travaux ont été effectués au chalet, sur les remises et écuries, sur l’établissement des bains…La Compagnie des Eaux de Pougues employait de jeunes femmes, qui devaient payer leur charge auprès de la Compagnie, afin de pouvoir exercer leur activité de « Donneuses d’eau ». Elles portaient un uniforme qui varia dans le temps. En 1900, comme il se doit, la robe était longue, rayée grise et rose, complétée d’une coiffure de dentelle blanche en forme de chignon.







Charles Chaplin et le Centre d''art contemporain avec sa Gentilhommière : http://verat.pagesperso-orange.fr/la_peinture/kant14.htm
Implanté dans l’ancienne station thermale de Pougues-les-Eaux, le Centre d’Art Contemporain (CAC) du Parc Saint-Léger fait partie d’un réseau national labellisé par le Ministère de la Culture, qui compte une quarantaine de centre répartis sur tout le territoire français. Ces Centres ont reçu pour mission de soutenir et promouvoir la création d’œuvres contemporaines, d’accueillir des artistes en résidence, et aussi de favoriser une diffusion auprès d'un certain public.Réhabilités en 1998 pour accueillir le Centre d’Art, les locaux dont l'usine d'embouteillage des Eaux de Pougues, datant du 19ème siècle, présentent aujourd'hui une surface d’exposition de 460m² répartie sur deux niveaux, des bureaux et des logements pour les artistes.





En cette toute fin de XIXème siècle, il existe une multitude de courants picturaux. Et si la mode est déjà à l'impressionisme, il reste toujours d'innombrables amateurs pour cette peinture académique un peu sensuelle, dont ces images sont assurément représentatives.Le maître d'alors, William Bouguereau est, à l'instar d'un Cabanel, toujours adulé et respecté du monde entier mais plus pour bien longtemps.Aujourd'hui appelés avec dérision "artistes pompiers", ces peintres qui ont perpétué la manière ingresque où le dessin reste fondamental, avec des sujets souvent inspirés de l'Antiquité, vont en effet rapidement perdre leur aura au bénéfice de l'art moderne. Edouard Bisson, Dagnan-Bouveret, William Bouguereau, Walter Crane, Herber Draper, Zuber-Buhler, Lord Leighton, Robert Auer - Botticelli, Titien, Rubens ou encore Boucher ont honoré la nudité féminine, lui conférant un statut respectable et en quelque sorte officiel. Dans la seconde partie du XIXème siècle, les visiteurs du Salon de Paris ou bien encore ceux des expositions d'été de la Royal Academy de Londres, peuvent contempler sans problèmes moraux et sans culpabiliser les nus plus ou moins sensuels de Bouguereau ou de Lord Leighton.Le Nu "académique", désormais bien ancré dans la morale bourgeoise, se trouve représenté dans toutes les manifestations artistiques de l'époque. Il est incontestablement populaire et avec l'invention de la photographie et du procédé de photogravure, les reproductions de ces nus de Salon, toujours glabres, seront vendues en énormes quantités. Des critiques comme Armand Silvestre, des revues tel le Panorama Salon, sont même spécialisés dans la description du genre.




vendredi 21 novembre 2014

La Compagnie des Eaux

Compagnie des Eaux Minérales de Pougues et de Carabana
Administration, 15 & 17 rue Auber à Paris

Station des Dyspeptiques et des Neurasthéniques - Cures d'air et de repos
Établissement Thermal ouvert du 1er juin au 30 septembre
Pougues, sources Saint-Léger et Alice, eaux de régime, des faibles et des convalescents.

L'eau de la source Alice est la seule indiquée dans le traitement de la tuberculose par la récalcification.
Eau minérale naturelle Carabana, purgative, dépurative, antiseptique. Effet certain, rapide et doux - Un verre à bordeaux matin et soir.





mardi 18 novembre 2014

Kenyon Cox





Kenyon Cox, né le 27 octobre 1856 à Warren (Ohio) et mort le 17 mars 1919 à New York, est peintre, illustrateur et écrivain.
Kenyon Cox étudie d'abord à l'Art Academy de Cincinnati avant de suivre les cours de la Pennsylvania Academy of Fine Arts à Philadelphie. En 1877, il part pour Paris où il est l'élève de Carolus-Duran puis de Jean-Léon Gérôme, Alexandre Cabanel et Henri Lehmann à l'école des Beaux-Arts de Paris. En 1882, il rentre aux États-Unis et s'installe à New York. Il peint mais réalise aussi des illustrations, principalement pour des raisons alimentaires, qui lui apportent une certaine notoriété. Il écrit par ailleurs des critiques artistiques pour le New York Evening Post et d'autres magazines, comme The Nation, Century ou Scribner’s. En 1883, il publie un premier poème qui remporte un certain succès dans les cercles artistiques. En 1892, il épouse Louise Howland King, l'une de ses étudiantes à l'Art Students League of New York.

À partir de 1893, Kenyon Cox se consacre de plus en plus à la peinture murale. Il remporte en 1910 la médaille d'honneur de la peinture murale décernée par l'Architectural League et devient président de la société nationale des peintres muraux de 1915 à 1919.

samedi 15 novembre 2014

Hôtel du Parc





Hôtel du Parc à Saint-Honoré-les-Bains

Castel du Parc :
Construction réalisée pour le docteur Breuillard, entre 1885 -1888 ainsi que le Castel des Cèdres qui lui fait face, avec la même roche aux délicates nuances multicolores extraite de la carrière de la Hâte, toute proche. La reine Isabelle II d'Espagne, en disgrâce, exilée en France, fit plusieurs séjours à Saint-Honoré. Elle demeura un temps dans la suite située au premier étage du Castel du Parc qui conserva son linge de chambre jusqu'au milieu des années 1970. Jules Renard, dans ses mémoires, fait allusion à la royale présence.
Acheté par la Société thermale qui y fit des agrandissements en 1920. Il connut différents propriétaires avant de fermer dans les années 1970. L'hôtel du Parc, plus grand édifice de Saint-Honoré avec les Thermes et l'hôtel du Morvan, appartient à un Italien mais est laissé à l'abandon depuis plusieurs années. Il est en ruines, la toiture est éventrée ainsi que la façade arrière. Il est pourtant inscrit à l'inventaire du patrimoine notamment, pour l'importance de sa toiture couvrant un ensemble de volumes subtilement agencés.


lundi 10 novembre 2014

Les Donneuses d'eau

UNE PROFESSION AU COEUR DU THERMALISME FRANÇAIS (1840-1914)

Éric Jennings
Publications de la Sorbonne | Sociétés & Représentations
2014/2 - N° 38 pages 143 à 170
http://www.cairn.info/revue-societes-et-representations-2014-2-page-143.htm
Pour citer cet article :
Jennings Éric, « Donneuses d'eau. Une profession au coeur du thermalisme français (1840-1914) »
Sociétés & Représentations, 2014/2 N° 38, p. 143-170. DOI : 10.3917/sr.038.0143

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La question des donneuses d’eau dans les stations thermales françaises du XIXe siècle procède de plusieurs historiographies. Elle relève d’abord de l’histoire des femmes. De jeunes provinciales trouvèrent dans cette activité une rémunération un moyen éventuel d’ascension sociale, dont l’exemple le plus connu reste sans doute celui de Coco Chanel, qui s’adonna à cette activité à Vichy en 1906. Elle relève ensuite de l’histoire médicale.
Dans le monde hautement ritualisé de la crénothérapie, et plus particulièrement de la cure de boisson, la donneuse d’eau se situait entre le buveur et le griffon, entre la source et le malade. Au carrefour de la science et du sacré, elle occupait un espace unique, mais contesté. Elle faisait partie intégrante de l’encadrement médical de la cure, à tel point que certaines donneuses d’eau se virent citées dans des articles scientifiques. Mais d’autres hydrothérapeutes virent en elles un intermédiaire inutile, voire nocif, entre le malade et les bienfaits d’une eau pure et originelle. La donneuse d’eau relève enfin d’une approche spectaculaire, ou tout au moins visuelle, de la station thermale. Cet emploi réservé aux femmes ne manqua pas d’être fortement remarqué par la clientèle masculine, comme en témoigne sa représentation dans les poèmes, chansons et dessins, notamment. On retiendra à ce propos l’utilité du concept de para- sexualité élaboré par Peter Bailey dans un article sur l’ère victorienne.  
Enfin, et paradoxalement, la donneuse d’eau se situait également aux marges de la station, de la cure et de la société : vêtue d’un costume régional alors que celui-ci s’éteignait, incarnant une identité locale face à une clientèle internationale, figurant rarement dans les registres et autres documents d’archives, c’est principalement dans les sources visuelles, littéraires, périodiques et spécialisées que l’on retrouve sa trace. Alors que depuis quelques années les donneuses d’eau ont refait leur apparition à Vichy, une analyse de leur rôle et de ses représentations peut apporter un éclairage social et de genre sur une profession entièrement féminine, indissociable d’un secteur lui-même complexe, entre médecine, tourisme, loisir et rituel.

Qu’était-ce qu’une donneuse d’eau ?
Le nom même semble renvoyer à l’Antiquité ou aux donneuses d’eau bénite. Il est difficile d’établir l’origine de l’activité thermale moderne avec précision. Un ouvrage datant de 1734 signale des « femmes qui distribuent l’eau aux fontaines » de Spa. D’après ce texte, aux sources de la Souveraine et de la Géronstère, ces femmes remettant l’eau aux buveurs, affirmaient par ailleurs pouvoir présager la pluie à partir de leurs « fontaines », prophétie validée et confirmée par un médecin de Spa, ce qui suggère une relation de savoir particulièrement intrigante… Leur rôle consistait à puiser l’eau à la source thermale, puis à la remettre à la buveuse ou au buveur venu en cure.
Empêcher le curiste de se servir soi-même relevait de plusieurs considérations : la manœuvre rappelait la fonction de serveuse et renvoyait sans doute à une image de domestique, elle reflétait peut-être un souci de parcimonie et de sociabilité thermale, mais, à partir de la deuxième moitié du XIXe siècle, elle trahissait surtout le désir de maîtriser, de doser et de réguler les intervalles d’ingestion et les quantités d’eau minérale consommée. À ce titre, les donneuses d’eau faisaient partie d’un ensemble disciplinaire, censé contrôler les pratiques corporelles tout au long de la cure.
Elles incarnent en outre une spécialisation certaine. Contrairement aux masseuses ou autres « baigneuses », les donneuses d’eau ne participent qu’au processus de cure de boisson. Appuyées sur les parois de la buvette, placées parfois en contrebas des buveurs comme aux sources Mesdames et de la Grande-Grille à Vichy, ou encore à la source Eugénie de Royat, elles sont intimement liées à la cure de boisson. 
Il va sans dire que les carrières proches du sommet de la lucrative filière thermale étaient hors de portée des femmes, ou tout au moins de l’écrasante majorité d’entre elles. Le 8 juillet 1882, la Revue des villes d’eau de l’Est claironnait l’arrivée d’une femme médecin à Bourbonne-les-Bains (Haute-Marne).
Madame le docteur Ribard devenait  ainsi, d’après le journal en question, la neuvième femme française à prononcer le serment d’Hippocrate (même si les femmes médecins étrangères étaient selon cette source relativement  nombreuses à exercer dans l’hexagone à cette même époque). Les donneuses d’eau ne s’apparentaient certainement pas à ces médecins :
Issues de milieux modestes, provinciales pour la grande majorité d’entre elles, n’ayant pas poursuivi de longues études, elles pratiquaient parfois plusieurs emplois, dont celle de donneuse pendant la saison estivale car, dans la majorité des stations, le thermalisme ne demeurait qu'une activité saisonnière.




C'est d'ici, sous la verrière du Pavillon des Sources, près des deux fontaines roses, qu'opéraient les Donneuses d'eau.
Toutes, n'étaient pas aussi jolies que Charlotte, peinte en 1908 par William Godward, dans son seyant sarrau à l'antique couleur safran.
Toutes, n'étaient pas non plus aussi dévêtues que le charmant modèle, perché sur son tabouret, représenté par luis Falero.
Mais les Donneuses d'eau se devaient toujours d'être aimables et souriantes avec les curistes.
Pleines d'attention, elles offraient aux visiteurs de passage un gobelet ou une coupe d'eau curative et bienfaisante.
Protocole
Tout baigneur qui désirait suivre un traitement devait en faire la déclaration au bureau de l'administration. Une carte d'abonnement à la buvette lui était alors délivrée. Cette carte numérotée lui donnait également droit à l'accès au parc de l'établissement et à la circulation dans toutes les propriétés de la Compagnie. Chaque carte était accompagnée d'un verre en cristal de Baccarat gradué en grammes. Ce verre, déposé à la buvette, permettait au buveur, contre la présentation de sa carte et le dépôt d'un ticket, d'aller boire facilement à toute heure.
Le verre, sur lequel les donneuses d'eau marquaient le numéro de la carte, était conservé par le baigneur après sa cure.
http://marc.verat.pagesperso-orange.fr/v1.htm