Au Salon de 1859, une œuvre du sculpteur Emmanuel Frémiet fut écartée par le jury.
Il s'agit d'un Gorille enlevant une jeune femme.
« Voici mesdames et messieurs, le fameux gorille de M. Frémiet », commente Nadar. « Il emporte dans les bois une petite dame pour la manger. M. Frémiet n’ayant pu dire à quelle sauce, le jury a choisi ce prétexte pour refuser cette œuvre intéressante. » Et Baudelaire dans ses Salons : « Voilà donc le moyen d’étonnement trouvé ! « Il l’entraîne ; saura-t-elle résister ? » telle est la question que se fera tout le public féminin. Un sentiment bizarre, fait en partie de terreur et en partie de curiosité priapique, enlèvera le succès. » De la terreur érotique de la sculpture de Frémiet, nous connaissons un sequel qui jouit d’une longue fortune : King Kong, le dieu de la jungle, emporte sous son bras puissant une blonde terrorisée. Baudelaire lève l’énigme : « Songez bien qu’il ne s’agit pas de manger, mais de violer. » Si nous connaissons le roi Kong, ses antécédents nous sont moins connus. Au musée archéologique de Naples, l’exposition Amori Divini rafraîchit notre mémoire : Léda, Europe, Io, Callisto, Ganymède, Hermaphrodite et jusqu’au pâle Narcisse ont tous subi une violence qui, au seuil de l’adolescence, a changé leur vie à jamais. Ils ont été la proie d’un dieu, d’une violence divine qui leur est tombée dessus et a chamboulé leur nature.